29 Juillet 2021

[Quézako ?] Prometheus : allumez le feu !

Le moteur européen expérimental Prometheus va s’allumer pour la 1ere fois en décembre 2021.
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Les 2 réservoirs du moteur Prometheus sur le banc d’essais, à Vernon (27). Le moteur sera installé en dessous. Crédits : ArianeGroup/Dominique Eskenazi.

Les 1ers essais de mise à feu de Prometheus auront lieu en décembre sur le site d’ArianeGroup de Vernon (27) : le moteur expérimental va s’allumer pour la 1ere fois. Les 2 réservoirs d’ergols viennent d’être installés sur le banc d’essais (photo), l’un pour l’oxygène liquide, l’autre pour le méthane liquide. Car c’est bien là l’une des spécificités de ce moteur-fusée : Prometheus fonctionne grâce à la réaction chimique entre le couple oxygène/méthane et non pas oxygène/hydrogène, comme les moteurs traditionnels d’Ariane 5 et bientôt 6. Une innovation qui permet à Prometheus d’être moins cher et réutilisable (voir encadré).

Cela fait 15 ans que l’on n’a pas testé de nouveau moteur-fusée de grosse propulsion liquide en Europe

Jean-Marc Bahu, sous-directeur du futur et de l’innovation des systèmes de lancement au CNES. Crédits : CNES/H. Piraud.


Une campagne de 10 à 15 essais de mises à feu est ainsi au programme de cette fin d’année : le 1er test d’allumage va durer moins d’une sec, et jusqu’à une vingtaine de sec pour le dernier. Plusieurs dizaines de capteurs sont installés sur le moteur pour suivre ses performances et les analyser. « Cela fait plus de 15 ans que l’on n’a pas testé un nouveau moteur-fusée de grosse propulsion liquide en Europe, se réjouit Jean-Marc Bahu, notre sous-directeur du futur et de l’innovation des systèmes de lancement. La dernière 1ere mise à feu d’un nouveau moteur de ce type, c’était celle du Vinci en 2005. »

Petits et grands essais

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Les réservoirs, sur leur banc de tests (à gauche), sur le site d'ArianeGroup à Vernon (27). Crédits : ArianeGroup/Dominique Eskenazi.

Le moteur va ainsi être installé sous les 2 réservoirs, mesurant chacun 5 m de haut et 2,2 m de diamètre, préfigurant ce que va être Themis, démonstrateur européen d’un 1er étage de fusée réutilisable. Puis un « guide-jet » va être installé sur le banc de tests. Ce système dévie les gaz éjectés par le moteur, à l’horizontal et vers une zone sure.

Cette campagne de tests sera suivie d’une seconde, dès 2022, sur un site du DLR, l’agence spatiale allemande. Les 2 réservoirs d’ergols seront alors plus volumineux pour se rapprocher de ce qu’ils seront dans la version finale de l’étage (environ 30 m de haut). Et les tests dureront jusqu’à 500 sec, comme lors d’un lancement réel. « Mais il est important de commencer par des essais courts, plus rapides et moins couteux, explique Jean-Marc Bahu. On dégrossit, on valide le dimensionnement du moteur, son bon fonctionnement. On y va étape par étape, dans une logique incrémentale. »  Enfin, place aux essais en vol. Prometheus viendra intégrer la version intermédiaire de Themis dont le 1er vol de démonstration est prévu en Suède en 2023.

« La 1ere mise à feu d’un moteur reste un moment fort, sourit Jean-Marc Bahu. On sera dans la salle de commandes pour suivre les opérations en direct. On ne sera pas juste à côté, mais on aura le son, on ressentira les vibrations du moteur lors de son allumage. »

Oxygène-Méthane, chimie gagnante

Prometheus sera le moteur des fusées européennes qui succèderont à Ariane 6. Un moteur « low cost » : son coût est visé à 1 million d’euros, 10 fois moins qu’un moteur Vulcain (Ariane 5/Ariane 6). Comment ? Grâce à l’impression 3D, qui permet de fabriquer plus simplement de nombreuses pièces (photo ci-contre). Ou encore grâce à l’utilisation du méthane comme carburant (à la place de l’hydrogène). Un exemple : les débits volumiques du méthane et de l’oxygène sont identiques, donc une seule turbopompe suffit pour injecter les 2 ergols liquides dans la chambre de combustion du moteur, alors qu’il en faut 2 avec un moteur hydrogène/oxygène. De plus, le méthane est liquide à -161°C contre – 253°C pour l’hydrogène. Le moteur est donc moins « sollicité » pendant son fonctionnement. Des aspects qui permettent de viser la réutilisation du moteur et donc du premier étage de la fusée dans lequel il sera intégré.

Du méthane vert

Pour alimenter les futures fusées en méthane, nous voulons développer en Guyane une filière de production de biométhane. Du méthane vert, produit à partir de déchets ménagers et industriels, et de produits agricoles (sorgho…) cultivés dans des zones non utilisées pour l’alimentation. Les premières études ont validé le principe. Prochaine étape : la construction d’une usine pilote qui pourrait approvisionner Themis.

Le saviez-vous ?

Nous avons lancé le programme Prometheus en 2015 avec ArianeGroup. Après un 1er financement de 75 millions d’euros en 2017, l’Agence spatiale européenne (ESA) a débloqué en 2020 135 millions d’euros pour poursuivre le programme. Avec notamment les 1ers tests d’allumage, qui bénéficient de 15 millions d’euros supplémentaires via le programme « France Relance » !

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