3 Septembre 2020

[QUÉZAKO?] Le Soleil dans le capteur

A votre avis, cette large « bouche » du satellite Solar Orbiter sert-elle à capturer les particules du vent solaire ?

Crédits : CNES/OMP/IRAP/CNRS/UT3/CHASTANET Sébastien, 2017.

Et bien, Non !

L’entrée des « artistes » — c’est-à-dire des particules solaires — se fait de l’autre côté, dans une fente très étroite (0,4 mm) visible sur la photo ci-contre. La large « bouche » dorée est la sortie ! Son ouverture est telle qu’aucun rayon solaire ayant pénétré par la face d’entrée ne touche une zone quelconque du capteur, appelé PAS pour Proton-Alpha Sensor. Ce capteur du satellite Solar Orbiter est capable de déterminer la direction d’arrivée et l’énergie de chaque particule récoltée.

un réveil en plein confinement

Développé sous la responsabilité de l'Institut de recherche en astrophysique et planétologie de Toulouse (IRAP), PAS a été mis en marche pour la 1ère fois en plein confinement, les 14 et 15 /04/20, alors que Solar Orbiter lancé le 10/02/2020 depuis la Floride était à 2 min lumière de la Terre. Un instant magique pour les chercheurs français qui travaillent depuis plus de 10 ans sur l'analyseur de vent solaire SWA auquel il appartient.

« Après plusieurs heures de lent éveil, le capteur a bien ouvert les yeux, son cœur s’est mis à battre au bon rythme (1 millisecondes de battement, soit la durée d'une mesure élémentaire) avec l’ampleur voulue (13 kV crête à crête soit l’équivalent d’une ligne moyenne tension ) tout en restant d’une stabilité et placidité parfaite » se souvient Philippe Louarn, directeur de recherche à l’IRAP et responsable scientifique de PAS.

« Les 1eres données sont très prometteuses. 2 heures après son réveil, PAS a même enregistré une discontinuité magnétique venant du Soleil avec une cadence d'acquisition de 250 millisecondes. C’est quasiment 100 fois plus vite que tout ce qui existait auparavant dans le domaine. Avec de telles mesures, nous disposerons de quoi ouvrir un nouveau chapitre dans l’étude de la turbulence, du chauffage et de l’accélération des particules dans des milieux astrophysiques. »

Se rapprocher du Soleil, encore et encore

En juin 2020, le satellite européen s’est approché à 77 millions de km de la surface du Soleil, soit environ la moitié de la distance entre notre étoile et la Terre. En mars 2022, il fera un passage à 48 millions de km de la surface du Soleil, à l’intérieur de l’orbite de Mercure. Comme le souligne Isabelle Fratter, cheffe de projet Solar Orbiter au CNES, « grâce à la combinaison des mesures de ses 10 instruments scientifiques, Solar Orbiter pourrait permettre de découvrir les processus fondamentaux connectant l'atmosphère hautement dynamique et magnétisée du Soleil et le vent solaire dans tous ses états calmes et perturbés, du détail de l'organisation "microscopique'"des populations de particules jusqu'aux distances interplanétaires. »

L’enjeu est de comprendre comment le Soleil, lui-même, influe sur le vent solaire qui se propage dans l’espace interplanétaire et donc dans l’environnement spatial terrestre.

Le capteur PAS protégé par son triple bouclier thermique (la fente d'entrée se trouve en haut). Au fil de la mission, le bouclier fera face à des températures comprises entre -120 °C  et +550 °C. Crédits : CNES/OMP/IRAP/CNRS/UT3/CHASTANET Sebastien, 2017.

Localisation du senseur PAS sur le satellite Solar Orbiter. PAS est l'un des 3 détecteurs de l'analyseur de vent solaire SWA. Crédits : ESA. 

Isabelle Fratter, cheffe de projet Solar Orbiter au CNES. En arrière-plan, le lanceur ATLAS V411 qui a emporté le satellite européen dans l'espace en février 2020. Crédits : CNES/I. Fratter, 2020.

Solar orbiter, une mission avec une forte contribution française

Solar Orbiter est une mission spatiale de collaboration internationale entre les agences spatiales européenne (ESA) et américaine (NASA). La France, au travers du CNES, de 7 laboratoires du CNRS, d’universités et du CEA, a participé à 6 des 10 instruments fixés sur le satellite. Le CNES a fourni l’instrument RPW (en photo ci-contre), un analyseur d’ondes radio et plasma et a assuré la maîtrise d’ouvrage des autres contributions, apportant son expertise technique aux partenaires en fonction des besoins. Dans le cas du capteur PAS, le CNES a assuré les activités d’ingénierie thermique et a pris en charge plusieurs tests de composants et matériaux, ainsi que des analyses relatives aux décharges électrostatiques, des expertises en compatibilité électromagnétique et des essais magnétiques.

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